Courrier à l’attention de la CRAIE dans le cadre du recours n°1389 suite à
la visite des laboratoires de la SWDE le mardi 27 février 2024
Comme demandé par votre Commission dans le mail qui m’a été adressé le 15 février, je
reviens vers vous suite aux échanges que nous avons eu avec des membres de la
SWDE (
Société
wallonne des eaux) au sein de leurs laboratoires de Fleurus, le mardi 27 février 2024.
Cette visite avait pour but de clarifier certains points attenants au traitement de ma
demande - notamment s’agissant des éléments avancés par la partie adverse quant à la difficulté
technique et à la surcharge de travail nécessaires à sa satisfaction -, mais également afin d’apporter
des éléments d’informations supplémentaires par la consultation de la base de données de la société.
Avant toutes choses, je tenais à saluer l’esprit d’ouverture dont ont fait preuve les membres
de la
SWDE présents lors de cet échange : malgré la réelle technicité de certains points soulevés lors
de nos discussions, des efforts ont été mis en œuvre afin d’apporter un maximum d’éléments
nécessaires à la compréhension de ces derniers.
Par ailleurs, je salue également l’accueil réservé aux personnes ressources qui m’ont
accompagné lors de cette visite - un toxicologue, un
data-journaliste et l’un des administrateurs du
collectif
SOS Notre Santé / Chièvres les Citoyens réunis -, sans l’aide desquels je ne serai pas
parvenu à tirer pleinement profit de cette rencontre.
R
a ppel concernant le contexte de cette rencontre organisée au sein du laboratoire de la
SWDE
J’en viens à présent à l’objet de cette visite et à la question qui intéresse votre Commission,
soit le sentiment que j’ai concernant la satisfaction de ma demande.
Pour rappel, ma demande portait sur l’ensemble des données d’analyse complètes des eaux
de quatre zones de distribution (suivant la nomenclature de la SWDE, il s’agit des zones n°1098,
n°1125, n°1161 & n°1165).
J’avais déjà obtenu partiellement satisfaction de cette demande en recevant, des services de
la
SWDE, les données d’analyse de PFAS réalisées depuis septembre 2023 (date de commencement
du
monitoring)
pour les quatre zones demandées, ainsi qu’un graphique indiquant une courbe de
taux totaux de PFAS pour le site du Château d’eau de Chièvres depuis octobre 2021 (date de
réalisation des premiers prélèvements destinés à l’analyse des taux de PFAS).
S’agissant des autres composants ou polluants analysés par la
SWDE, j’en restais alors aux
informations disponibles dans les seuls rapports consultables pour le public et disponibles sur
simple requête avec adressage – ces rapports n’indiquant que le nombre total de prélèvements
réalisés au cours de l’année ainsi que les valeurs médianes (soit celles partageant les ensembles des
valeurs observées en deux parts égales) pour les différents paramètres analysés, je restais sur ma
faim estimant que de telles données pouvaient masquer des taux s’écartant sensiblement de la valeur
médiane ainsi communiquée. Une telle invisibilisation de valeurs « aberrantes » me semblait
préjudiciable au public dans la mesure où l’exposition à de tels taux de ces composants / polluants
pouvait légitimement nous amener à craindre qu’un risque sanitaire puisse alors être encouru par la
population.
Cette crainte, couplée à l’absence d’explications précises concernant la surcharge de travail
qu’impliquerait la satisfaction de ma demande, motivait donc le maintien de mon recours auprès de
votre Commission pour refus d’informer.
Finalement, au terme de nos échanges, diverses observations ont pu être faites et un accord
a été trouvé avec la
SWDE qui me permet de réduire le périmètre de ma demande de façon à ce que
cette dernière puisse être satisfaite moyennant une charge de travail jugée acceptable par la partie
adverse.
link to page 2
Je procéderai ici en deux temps, exposant d’abord aux membres de la Commission les
observations faites lors de cette visite qui m’amènent à considérer comme fondé l’argument d’une
surcharge de travail qu’impliquerait la satisfaction totale de ma demande (1), puis présentant la ré-
évaluation de cette demande afin d’en préciser le périmètre de façon à lever cette difficulté liée à
une surcharge de travail (2).
(1) L
es observations faites l ors de cet échange avec les membres de la
SW
DE :
Plusieurs éléments compliquent la communication des données d’analyses complètes des
eaux de ces zones de distribution par la
SWDE :
- Tout d’abord, le fait que certaines données d’analyses brutes (notamment celles portant
l’accréditation de la
SWDE qui sont réalisées à la sortie du robinet des consommateurs finaux)
contiennent des données à caractère personnel (adresses, noms, etc.) dont la communication
nécessiterait un traitement manuel visant à l’expurgation de ces éléments afin de ne pas enfreindre
le RGPD (
Règlement général sur la protection des données à caractère personnel – une législation
européenne).
- Ensuite, la relative obsolescence du logiciel de traitement utilisé afin de structurer la base
de données de la
SWDE : en effet, ce dernier ne permet pas, en l’état, d’afficher des résultats
suivant les limites de détection (concrètement, le logiciel n’affiche pas les symboles « < » et « > »
nécessaire à la bonne compréhension de certaines données d’analyse – notamment s’agissant des
PFAS dont l’addition en vue d’obtenir une valeur totale est rendue délicate sans contextualisation
des données). Il est à noter qu’un nouveau logiciel doit être implémenté au sein du laboratoire de la
SWDE le 11 mars 2024. Cependant, bien que le cahier des charges de ce nouveau logiciel tienne
compte de cette nécessité d’un affichage des limites de détection des différentes valeurs, sa mise en
fonction se fera de façon progressive et ne pourra pas, en raison de l’architecture complexe de la
base de données actuelle et des incompatibilités de champs des deux systèmes, accueillir les
données antérieures à sa mise en fonctionnement (soit celles-là mêmes qui correspondent à notre
demande).
- Enfin, la prise en charge de certaines analyses par des laboratoires sous-traitants
complique encore le travail de formatage des différentes données afin que ces dernières puissent
être communiquées au public sans risque de mésinterprétations. Et, là encore, la communication des
données d’analyses brutes accompagnées des éléments de contextualisation nécessaires à leur bonne
compréhension s’avère difficile dans la mesure où ces données d’analyses devraient alors être
vérifiées manuellement afin d’être expurgées des données à caractère personnel qu’elles recèlent
1.
Bref, étant donné le grand nombre de données entrant sous le périmètre de ma demande
initiale et prenant connaissance de ces divers éléments, il nous semble en effet qu’une satisfaction
totale de notre demande impliquerait un travail important de la part des services de la
SWDE.
Sans pouvoir estimer avec un grand degré de précision le nombre d’heures nécessaire à
cette fin, il ressort en effet de ce qui précède qu’une communication des données brutes
accompagnées des éléments de contextualisation indispensables à la bonne compréhension des
résultats ainsi communiqués (c’est-à-dire l’indication des limites de détection des différents
paramètres et de leur « représentativité » - soit le fait que les paramètres de l’eau analysée à la sortie
du robinet indiquent bien l’état de cette dernière au sein du réseau de distribution plutôt que
certaines propriétés spécifiquement dues à son passage par diverses installations au sein de
1
Les explications fournies par les membres de la
SWDE concernant ce dernier point rendent sans objet nos
interrogations, partagées aux membres de votre Commission dans notre mail du 11 février 2024, concernant l’écart
observé entre le nombre total de prélèvements annuels repris dans les rapports de la
SWDE librement accessibles au
public sur simple requête en ligne et ceux renseignés pour les seuls PFAS sur la période de quatre mois couverte par
le
monitoring depuis septembre 2023. En effet, comme nous le formulions alors à titre d’hypothèse, cet écart
s’explique par la réalisation de prélèvements exprès visant à la mesure des taux de PFAS.
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l’habitation – adoucisseur, filtres, etc.) demanderait un important travail d’anonymisation des
données d’analyses, nécessitant l’implication d’une main d’œuvre humaine.
Quant à la communication des éléments d’analyse suivant le formatage des données brutes,
nécessaire à leur inscription dans la base de données de la société, celle-ci s’avère également
délicate dans la mesure où les limitations techniques du logiciel ne permettent pas l’affichage de
résultats contextualisables sans qu’y soient adjointes ces données brutes elles-mêmes, dont le
traitement d’anonymisation serait une nouvelle fois nécessaire.
(2) L’accord conclu avec les membres de la
SWDE :
Une fois ces observations faites, nous avons donc conclu l’accord suivant avec les
membres de la
SWDE présents lors de cet échange :
(a) S’agissant des données relatives aux taux de PFAS, dont les révélations par la presse
motivaient initialement notre demande :
Nous faisions remarquer à la Commission, dans notre mail daté du 11 février, que les
résultats communiqués par la
SWDE pour la zone de distribution de Chièvres, soit un graphique
indiquant l’évolution du taux global de PFAS sur le site du Chateau d’eau d’octobre 2021 à
septembre 2023 avec indication de trois dates – le couplage des eaux, le début du filtrage par
charbon actif & la fin de l’installation des filtres à charbon actif -, ces données, disions-nous,
manquaient de précisions. Aucune mention de lieux ou de dates de prélèvements n’y figuraient, ni
d’indication précise pour chacune des 20 molécules de PFAS reprises dans la réglementation
européenne de 2020.
Puisque nous avons récemment pris connaissance de données plus précises liées à cette
zone de distribution (pour le site « P1 » et celui « CE » - du château d’eau de Chièvres) - données
qui ont été communiquées au public par l’équipe de journalistes de la RTBF
2 nous avons demandé
qu’en soit vérifiée la conformité par la
SWDE avec les éléments disponibles au sein de la base de
données de la société.
Ces données issues de l’enquête journalistique ont été communiquées par mail aux services
de la
SWDE en la personne de Mme xxxxxxx le 23 février. Les membres de la
SWDE présents lors
de cet échange ont accepté de procéder à cette vérification et de me communiquer le résultat de ce
travail, ceci afin de donner satisfaction à ma demande pour ce qui ressort spécifiquement des PFAS.
(b) S’agissant des autres paramètres analysés dans l’eau potable par la
SWDE et qui
tombaient sous le périmètre de ma demande (soit, pour rappel, les eaux de quatre zones de
distribution pour la période s’étalant du 1er janvier 2017 jusqu’au jour de l’introduction de ma
demande, fin 2023) :
Il est ressorti de nos discussions avec les membres de la
SWDE présents lors de cette
rencontre que le cadre légal entourant l’activité de la société dans le contrôle de la qualité des eaux
potables qu’elle produit et / ou distribue prévoit le signalement auprès des autorités compétentes des
« évènements » pouvant impacter la qualité de l’eau potable.
Ces « évènements » correspondent aux relevés de dépassements des valeurs paramétriques
(voir, pour certains composants ou polluants, de ces valeurs « ajustées » d’un certain pourcentage,
suivant un cadre normatif précis) et font l’objet d’une communication suivant un protocole précis
auprès des autorités compétentes via la plateforme en ligne
SIQUEP (pour
Système d’Information
sur la Qualité de l’Eau Potable) – au moins depuis 2018.
Afin d’avoir un ordre de grandeur concernant la fréquence de ces « dépassements », les
membres de la
SWDE nous ont indiqué un nombre approximatif de près de 200 évènements par an
2
À notre connaissance, ces données avaient alors été présentées par l’équipe de journalistes comme des documents
internes à la
SWDE – mais sans qu’une confirmation de cette information ait été apportée de la part de la société.
link to page 4 link to page 4
pour les 278 zones de distribution dont elle a la charge. Une fois encore, tous ces dépassements ne
sont pas nécessairement « représentatifs » de l’état de l’eau conduite sur le résea
u3.
Nous avons appris, à l’occasion de ces échanges, que les instances de régulation
responsables de ce registre
SIQUEP avaient pour intention, dans un avenir plus ou moins proche, de
rendre ces données accessibles au public
4.
En l’absence actuelle d’une telle communication, nous avons néanmoins convenu avec les
membres de la
SWDE présents lors de cette rencontre, d’une communication des différents
« dépassements » pour les quatre zones de distributions demandées depuis le 1er janvier 2017.
Précisons que ces signalements de « dépassements » seront adossés sur l’état des
législations en vigueur au moment où ont été réalisés les prélèvements en question. Autrement dit,
un taux supérieur à celui adopté dans la législation mais antérieur à cette dernière ne pourra pas
faire l’objet de ce « ciblage » par les services de la
SWDE et ne nous sera donc pas communiqué.
Par ailleurs, nous avons également convenu que tout élément permettant une
contextualisation de ces données relatives aux « dépassements » des valeurs paramétriques (ou des
valeurs paramétriques ajustées) pourraient être communiquées afin d’en permettre la bonne
compréhension.
Pour ma part, j’estime que cet accord permet une satisfaction de ma demande dans la
mesure où cette dernière était motivée par la crainte d’autres risques de contamination des eaux
potables sur ces quatre zones de distribution et que ce recentrement de ma demande autour des
« évènements » pouvant impacter la qualité de l’eau potable, bien qu’imparfait car adossé à une
législation elle-même en évolution, s’avère compatible avec la bonne continuité des services de la
SWDE.
Finalement, j’ajoute que les derniers éléments de ma correspondance avec la
SWDE sont
toujours
disponibles
en
ligne
à
l’adresse
suivante :
https://transparencia.be/request/analyses_completes_de_la_qualite#outgoing-8641
Précision importante : ce document a fait l’objet d’une relecture de la part des services de
la
SWDE afin de m’assurer de la conformité des éléments portés à la connaissance de votre
Commission avec les éléments de l’accord que nous avions conclu oralement lors de notre échange
du 27 février avec les membres de la société.
Évidemment, je ne manquerai pas d’avertir votre Commission dès que j’aurai accusé
réception de ces différentes informations de la part de la
SWDE.
Veuillez agréer, Mesdames et Messieurs les membres de la Commission de recours pour le
droit d’accès à l’information en matière d’environnement, l’expression de mes sentiments
distingués.
Romain Pion
3
Comme nous l’indiquions plus haut, un « évènement » peut également être tributaire de certaines installations
propres à l’habitation où est réalisé le prélèvement en question – cette « représentativité » doit alors faire l’objet
d’investigations plus poussées sur le réseau de distribution.
4
Non seulement les « évènements » ainsi rapportés, mais également l’ensemble des données relatives au contrôle de
la qualité de l’eau potable sur les sites de prélèvements des consommateurs finaux transmis par les 88 distributeurs
d’eau présents en région wallonne – au nombre desquels nous comptons la
SWDE comme principal distributeur
(approximativement 60 % de la population en région wallonne).