Monsieur Claude Archer
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Lander PICCART
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Bruxelles, 30 août 2023
Objet : votre courrier du 31 juillet 2023
Monsieur Archer,
J'accuse bonne réception de votre courrier du 31 juil et 2023.
Je constate toutefois que ce dernier est empreint de plusieurs inexactitudes factuelles et juridiques.
I.
Les faits évoqués
Dans votre courrier du 31 juil et 2023, vous soutenez que :
- la Commission d'accès aux documents administratifs (CADA) m'aurait demandé de divulguer les emails que
j’aurais échangés d’une part, avec Monsieur Pedro Facon, en tant que commissaire Corona, et, d’autre part,
avec Madame Erika Vlieghe, en tant que présidente du GEMS, à la suite d'une procédure engagée par un
journaliste du quotidien Het Laatste Nieuws (vous précisez ensuite qu'il s'agit de M. Jeroen Bossaert) ;
- la non-divulgation des emails susmentionnés serait contraire à l’article 32 de la Constitution et que M. Bossaert
aurait en conséquence introduit un recours auprès de la section du contentieux administratif du Conseil d'État ;
- dans le cadre de cette procédure, le Conseil d'Etat m'aurait condamné à transmettre lesdits emails ;
- le simple refus de divulguer certains documents administratifs à M. Bossaert serait contraire à l’article 151 du
code pénal.
Dès lors, vous réitérez la demande de M. Bossaert et me sommez de vous transmettre « enfin » les documents visés.
II.
L'importance de la transparence et de la publicité de l’administration
Je n’ignore pas l’existence du droit à l'information de tout citoyen ni le caractère essentiel que revêt la publicité de
l’administration dans notre démocratie, laquelle assure et renforce, entre autres, le contrôle externe des actions du
pouvoir exécutif. C'est d’ail eurs la raison pour laquelle le droit à l'information a été inscrit à l'article 32 de la
Constitution.
Au niveau fédéral, la publicité de l’administration est garantie par la loi du 11 avril 1994. Toutefois, cette loi prévoit
également des limitations au droit à l’information des citoyens. Il ne s’agit donc pas d’un droit absolu. Dans certaines
hypothèses, les autorités fédérales (en ce compris les ministres) sont ainsi légalement tenues de refuser une
demande d’accès à des documents administratifs. Le cas échéant, il ne peut être question d’une quelconque
violation de l’article 32 de la Constitution.
Comme il sera exposé ci-après, il s’ensuit que le refus opposé à la demande de M. Bossaert est légitime et n’est pas
arbitraire.
Cette mise en balance montre clairement que le refus de la demande de M. Bossaert ne constitue en aucun cas une
infraction à l'article 32 de la Constitution, et ne montre certainement pas que la décision de refus a été prise sur une
base arbitraire, ce que j'explique plus en détail ci-dessous.
III.
Discussion des faits et des arguments juridiques évoqués
A. Décision de la CADA
Vous alléguez que la Commission d'accès aux documents administratifs (ci-après, « la CADA ») aurait demandé que
je transmette les courriers électroniques qui font l’objet de la demande de M. Bossaert.
Toutefois, la CADA est un organe qui rend des
avis dans le cadre d'un recours administratif introduit lorsque le
demandeur rencontre des difficultés pour obtenir la consultation ou la correction d'un document administratif. Elle
ne peut en aucun cas contraindre l'autorité administrative fédérale de divulguer certains documents administratifs.
De plus, dans le cadre de la demande de M. Bossaert, la CADA a indiqué que je n'avais pas suffisamment motivé la
raison pour laquel e les documents administratifs en question n'avaient pas été divulgués. Je n’ai aucunement fait fi
de cet avis mais en revanche bien tenu compte des remarques de la CADA et pris une nouvel e décision de refus le
5 juin 2023 à l’égard de la demande de M. Bossaert.
B. Procédure devant la section du contentieux administratif du Conseil d'État
i.
Rapport de l’auditeur
Dans le cadre de la procédure devant la section du contentieux administratif du Conseil d'État introduite par M.
Bossaert à la suite du rejet de sa demande de reconsidération le 11 novembre 2022, un rapport a été rendu par
l'auditeur.
L'auditeur rédige un rapport concernant les procédures pendantes devant le Conseil d'État et rend un avis sur le
fond de la procédure pendante. L'auditeur ne prend
aucune décision définitive et fait uniquement une première
analyse du dossier et des arguments soulevés par les deux parties.
Nul e part l'auditeur n'a indiqué que les courriers électroniques qui faisaient l'objet de la demande de publicité de
l’administration devraient être remis à M. Bossaert, ce qui ne relèverait aucunement de la compétence de l'auditeur.
ii.
Arrêt de la section du contentieux administratif du Conseil d'État
Dans votre courrier, vous affirmez que le Conseil d'Etat m'aurait entre-temps condamné à transmettre les e-mails
sur lesquels porte la demande de M. Bossaert. Vous prétendez ensuite que j'aurais commis une il égalité en retirant
la décision antérieure de refus et en prenant une nouvel e décision de refus, afin d'échapper aux conséquences de
l'arrêt du Conseil d'Etat.
Il s'agit toutefois d'une manière erronée de présenter les faits. En effet, il est légitime pour un ministre de retirer
une décision antérieure et d'en prendre une nouvel e, y compris dans le cadre d'une procédure devant le Conseil
d'État. Dans cette nouvelle décision, les motifs du rejet de la demande de M. Bossaert étaient exposés plus en détail.
Dans son arrêt du 29 juin 2023, le Conseil d'État a donc constaté que la décision de refus faisant l'objet de la
procédure de recours pendante a été retirée. Nous tenons à souligner que dans cette procédure,
M. Bossaert s’est
désisté de son recours.
En tout état de cause, le Conseil d'État ne s'est jamais prononcé sur le fond de la demande et de la décision de refus
qui a suivi, et n'a certainement jamais déclaré que les e-mails qui faisaient l'objet de la demande devaient être
transmis. C’est d'ail eurs tout simplement impossible, étant donné que la section du contentieux administratif du
Conseil d'État
peut uniquement annuler des décisions des autorités administratives. Le Conseil d'État ne peut donc
jamais se substituer à l’autorité administrative et imposer une certaine décision d’initiative.
IV.
L'application de l’article 151 du code pénal
Dans votre courrier, vous affirmez que, le simple fait de rejeter la demande de M. Bossaert violerait l'article 32 de la
Constitution et, par conséquent, automatiquement l'article 151 du code pénal. Cet article est formulé comme suit :
« Tout autre acte arbitraire et attentatoire aux libertés et aux droits garantis par la Constitution, ordonné
ou exécuté par un fonctionnaire ou officier public, par un dépositaire ou agent de l'autorité ou de la force
publique, sera puni d'un emprisonnement de quinze jours à un an. ».
L'application de cet article est interprétée de manière extrêmement restrictive par la jurisprudence pertinente : en
effet, le fait qu'une décision soit inappropriée (Bruxel es 31 décembre 1947, RDPC 1947-1948, 472) ou même qu'elle
contienne des erreurs administratives (Bruxel es 13 octobre 2004, Amén. 2005, 169) n'est pas suffisant pour conclure
à l'existence d'une violation et, dès lors, il n’en résulte pas d’infraction. En effet, il faut que le fonctionnaire concerné
agisse de manière arbitraire et délibérée dans le but de violer les droits du citoyen ou les devoirs de l’autorité dans
la Constitution (I. Delbrouck, Strafrecht Duiding, 2018, p. 277).
Il n’est nullement question d’une tel e attitude en l’espèce. J’ai, au contraire, veil é au strict respect de l'article 32
de la Constitution et des intérêts de la loi du 11 avril 1994 et, agi dans le seul but de protéger et de respecter les
droits de chacun.
En effet, l'article 32 de la Constitution dispose ce qui suit :
« Chacun a le droit de consulter chaque document administratif et de s'en faire remettre copie, sauf dans
les cas et conditions fixés par la loi, le décret ou la règle visée à l'article 134. »
Le droit fondamental mentionné à l'article 32 de la Constitution n'est donc pas un droit absolu, mais un droit qui
peut être limité par une loi, un décret ou une ordonnance. Le Constituant a donc donné au législateur une certaine
liberté pour introduire certaines exceptions au droit fondamental dans les situations où cela est souhaitable.
Dans la situation du refus de la demande de M. Bossaert, ce refus est fondé sur divers motifs d'exception inscrits
dans la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l'administration. Il ne s'agit en aucun cas d'une violation de
l’article 32 de la Constitution, ni d'une décision arbitraire. Qui plus est, la divulgation pure et simple des e-mails
faisant l'objet de la demande reviendrait à méconnaître la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de
l'administration. J’estime avoir fait une correcte application de la loi par refuser d’accéder à cette demande.
V.
Traitement de la demande de divulgation de certains documents dans le cadre de la publicité de
l’administration
Dans votre courrier, vous réitérez la demande de M. Bossaert en poursuivant la divulgation des documents suivants :
- Les e-mails entre le commissaire Corona, M. Facon, et moi-même d'octobre 2020 à avril 2022 ;
- Les e-mails entre la présidente du GEMS, Mme Vlieghe, et moi-même d'octobre 2020 à aujourd'hui ou avril 2022
(les deux dates sont indiquées).
Vous élargissez même la question de M. Bossaert, puisque vous demandez à la fois les e-mails de M. Facon et de
Mme Vlieghe qui me sont adressés
et la correspondance électronique que j’ai adressé à M. Facon et à Mme Vlieghe.
Vous indiquez également que vous souhaitez que votre demande soit « enfin » acceptée. Permettez-moi de
souligner que vous n'avez encore jamais adressé une tel e demande à moi-même ou à mes organes stratégiques.
Nous considérons dès lors votre courrier comme une première demande concernant la communication de certains
documents administratifs en vertu de la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l'administration.
Compte tenu du personnel réduit en raison du congé d'été, il ne nous est pas possible de répondre à votre demande
dans le délai de trente jours prévu par la loi.
Nous sommes donc contraints d'avoir recours à une prolongation de ce délai de quinze jours maximum, comme le
prévoit l'article 6, § 5, de la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l'administration.
Étant donné que votre demande date du 31 juil et 2023, compte tenu du délai susmentionné, nous répondrons à
votre demande pour le 14 septembre 2023 au plus tard.
Date : le 30 août 2023
Digitaal ondertekend door Frank
Frank Vandenbroucke
Vandenbroucke (Signature)
Datum: 2023.08.30 21:16:45
(Signature)
+02'00'
Frank VANDENBROUCKE
Vice-Premier ministre et ministre des Affaires sociales et de la Santé publique